Exposition "Paroles de Rassuen"

Publié le par PV

Sur l'initiative de Martine Sciallano, jusqu'à récemment conservatrice du Musée d'Istres, le SAN Ouest Provence a décidé de prolonger le partenariat avec Paroles Vives afin de réaliser une exposition  ethno historique  présentant , d'une part, les entretiens réalisés en 2005 auprès des anciens ouvriers par l'association, d'autre part , le documentaire réalisé par Jean-Pierre Rosseuw sur l'histoire de l'usine de Rassuen et la mémoire de ses employés. L'exposition traitera de différentes thématiques :
  • l'histoire de l'usine depuis l'exploitation du sel, de la fabrication de la soude et des produits chimiques jusqu'à sa dernière activité avant fermeture en 1987, la fabrication des engrais agricoles
  • la source d'emploi que représentait le site, parfois pour toute une famille et sur plusieurs générations
  • la place de l'usine dans le tissu social et économique
  • la vie au travail et les changements apportés par l'expérience du comité d'entreprise
Pour traiter de ces thématiques nous utiliserons uniquement des extraits d'entretiens et des photographies prêtées par les anciens employés de l'usine.
Nous vous proposons ici quelques extraits :

"Moi j'avais 13 ans, j'ai quitté l'école à 11 ans et j'ai commencé à travailler parce qu'on était 10 enfants à la maison plus mon père et ma mère. J'ai même pas appris de métier. J'ai travaillé 10 ans chez le directeur comme domestique. C'est l'usine qui m'a embauché pour faire le domestique. Comme y envoyait un homme tous les matins là-bas (…) Ils changeaient souvent et moi (…) il m'a gardé 10 ans jusqu'à la guerre. Autrement je crois que j'y serai encore. Je faisais le domestique, j'arrivai le matin je commençai à aller chercher du lait à une ferme. Je l'apportais, j'allumais le feu. Je portais de l'usine du petit bois, du charbon et je pompais l'eau au puis. Il fallait pomper des caisses d'eau et je faisais tout ce qu'ils voulaient. Je préparais tout à la maison, y avait un tiroir dans la cuisine, j'y mettais le charbon, je préparais tout et j'allumais la cuisinière, je faisais bouillir le lait pour le directeur qui s'en allait."


 

"C'est tout à fait par hasard qu'en 1946 je suis allé travailler à Rassuen. Moi j'allais à Miramas pour prendre des cours particuliers. A bicyclette pour apprendre la sténo dactylo. Et je cherchais mon premier emploi. Mais à Istres vous savez un emploi de sténo dactylo, il y avait 3000 habitants. Il y avait la mairie, le notaire, l'huissier et le moulin à farine. Alors moi j'attendais un emploi. J'aurais pu travailler au camp d'aviation parce que mon père travaillait à la base 125 mais après il y a eu la guerre tout a été chamboulé. J'avais fait une demande et j'avais reçu les papiers pour rentrer dans l'armée. Mais mes parents… que je rentre à l'armée…enfin c'était la fin de la guerre. Et puis un jour mon professeur m'a fait savoir : « l'usine de Rassuen est venue nous demander une dactylo. Allez vous présenter. » J'y suis allée. Il y avait déjà une camarade de classe qui faisait un essai. On nous a gardé toutes les deux quinze jours et puis on lui a dit de rester chez elle la pauvre. Je crois que c'était écrit. Finalement j'y suis restée presque 38 ans."


 

"On peut pas comparer l’époque des Gardaire et aujourd’hui. Les gens étaient coincés ici. Ils étaient tous nés à Rassuen. Y avait rien, y avait pas de voiture, tout le monde n’avait pas de vélo. Alors qu'est-ce qu'ils faisaient ils restaient ensemble, ils allaient aux boules, voyez ? Ils se voyaient à l'usine où ils étaient ensemble, quand le travail était fini ils étaient encore ensemble. Où voulez vous qu’ils aillent ? Y avait pas beaucoup de moyens de locomotion et pas d'argent. Alors ils jouaient aux boules entre copains. Ils passaient de bonnes journées faut pas croire, ils étaient pas malheureux. Les femmes se retrouvaient toutes au lavoir par exemple."


 

"À l’époque de ma communion tout le monde allait à la messe le dimanche. C'était le patron Monsieur Gardaire qui voulait que tout le monde y aille. Enfin il nous obligeait pas mais … C'était bien vu. Mon père n’y allait pas mais ma mère, moi… Beaucoup de gens allaient à la messe.  À l'époque vous savez il fallait savoir lever son chapeau hein…Remarquez que maintenant aussi. Ah, ça je comprends ! À la maîtresse d'école tout ça on levait le chapeau. Si jamais j’enlevais pas le chapeau et que le patron rencontrait mon père il lui passait un savon et après je recevais la rouste. Et quand j'ai fait ma communion, c'est le patron qui m’a payé le costume, à moi et à mon frère. À beaucoup d'ouvriers ils payaient le costume."

 

 

 



Publié dans Restitutions

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